Une femme à sa fenêtre regardait, avec affliction, des bûcherons en train d’abattre tous les arbres d’une forêt séculaire. Sans état d’âme, ils sectionnaient, débitaient, tranchaient les branches et les troncs dans un fracas épouvantable.
Consternée par ce spectacle, la femme n’osait pourtant pas arrêter les gestes inconsidérés de ces ouvriers, car elle redoutait leur colère. Sa connaissance de la nature était grande et elle utilisait parfaitement son langage. Souvent, elle dialoguait avec les arbres, leur parlant avec bonté et ils lui répondaient avec douceur.
Mais ce matin, c’étaient leurs cris de frayeur et de souffrance qu’elle percevait et le vacarme était si insupportable que la femme finit par se boucher les oreilles. Mais peine perdue. Alors, n’y tenant plus, elle alla voir les bûcherons et déclara : « Je vous en prie, écoutez-moi ! ».
Sa voix était si forte et persuasive qu’instantanément, les hommes arrêtèrent leur odieux massacre. Elle continua :
« Entendez-vous les cris d’agonie des arbres que vous suppliciez ? Entendez-vous leurs gémissements de douleur ? ».
Pour toute réponse, ils se mirent à rire et, en toute hâte, retournèrent à leur triste besogne. Mais alors qu’ils s’apprêtaient à abaisser leur hache, retentit un hurlement si effrayant qu’ils arrêtèrent instantanément leur ouvrage. Et chaque fois, qu’ils tentaient de recommencer, les plaintes redoublaient d’intensité. Regardant avec effroi la femme, droite et immobile à la lisière de la forêt, ils lui demandèrent:
« Sorcière ! Quel est donc ce maléfice ? ».
« Il n’y en a point, répondit-elle. Nous avons des yeux mais nous ne voyons pas. Nous avons des oreilles mais nous n’entendons pas. Nous avons un nez mais nous n’avons plus de ressenti. Nous avons une bouche mais elle ne sert que notre avidité. Tous nos sens sont devenus insensibles. Réveillez-vous ! Si l’être humain continue de spolier la terre et d’utiliser toutes ses richesses à son unique profit, alors, toutes les espèces qui peuplent les eaux, les forêts, les prairies, les airs, toutes feront entendre leurs cris de désespoir, de souffrance et de mort ! Et nous disparaîtrons à tout jamais ! ».
Un jour, la nature finit par se rebeller et l’homme, dans la douleur, prit enfin conscience de ses erreurs. Il s’appliqua, désormais, à retrouver le chemin de la sagesse. Ce qu’en revanche, l’humanité ignorait, c’est qu’elle venait de vivre sa dernière chance de rédemption…
COMMENTAIRE
Ce conte a été donné à une femme qui dialogue réellement avec les arbres et est férue d'écologie et d'humanisme spirituel. En vérité une belle personne, à qui ce conte a vraiment parlé.
PISTE DE REFLEXION
Vous l'avez bien compris, ce message n'est pas uniquement écologique mais a, aussi, une portée spirituelle. Pourquoi le symbole de l'arbre ? Quel travail la femme a t-elle fait, pour pouvoir communiquer avec les arbres ? Que représentent les bûcherons ? Que faut-il vraiment faire pour sauver l'humanité ? Et pourquoi ce sentiment d'urgence ?
PARC MUSEE DE LA GUERRE. HCMC, VIETNAM (Photo de l'auteure).