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Un grand chef indien, sentant sa mort prochaine, décida de réunir autour de lui toute sa progéniture afin de désigner son successeur. La difficulté était d'importance car tous ses enfants étaient de valeureux guerriers ou d'habiles chasseurs.
Comment se résoudre à choisir ? Mais ce vieillard était un fin stratège, ne faisant jamais subir son autorité. Sa voie était celle de la sagesse. Pour cette affaire qui le préoccupait, il procéda d'étrange manière. Il portait autour de son cou un magnifique médaillon bleu pendu à une cordelette de cuir. D'un geste sec, il le fendit par le milieu. Dans le tipi, ce fut la consternation. Mais tous écoutèrent gravement l'explication du vieil homme :
"Je me sens bien las et malgré que je n'ai point démérité, je sais que je ne verrai pas le retour du printemps. Alors je souhaite que l'un d'entre vous me succède. Mon plus cher désir est celui-ci soit sage et vertueux. Mais comment le désigner puisque tous ici présents, vous avez fait preuve de dignité et de courage ? J'ai opté pour la voie du Grand Esprit : j'ai cassé en deux ce bijou. Une part demeurera sous cette tente et l'autre sera donnée au vent et à la pluie. Celui qui le retrouvera sera l'élu du Ciel plus que de moi-même. "
Tous enregistrèrent le message et malgré leur ressentiment, gardèrent le silence. Bientôt, comme il le pressentait, le vieux chef mourut. Son corps fut transporté au sommet d'une montagne et abandonné aux charognards, au soleil et à la terre.
Tous se mirent en quête de la partie manquante du médaillon. Ils arpentèrent avec frénésie forêts, prairies, plaines, traversèrent fleuves et rivières, gravirent des collines, frôlèrent des nuages. Mais sans aucun résultat.
Dans le village, vivait également un enfant bien trop jeune pour susciter le moindre intérêt. Il désirait ardemment devenir un vaillant guerrier ou un chasseur intrépide mais, pour l'heure, il se contentait d'aider les femmes à puiser de l'eau ou à couper du bois.
Ces occupations n'étaient guère enrichissantes, mais il ne rechignait jamais à rendre service avec amabilité et gentillesse. Un jour, sa mère lui demanda de vider l'intérieur d'un poisson. Le fils obéit, même si l'opération se révélait délicate et peu ragoûtante. Lentement, il tailla le ventre de l'animal, ôta les viscères avec d'infinies précautions et soudain, cachée dans les entrailles, découvrit la moitié du médaillon tant convoitée !
Ses cris de victoire furent si vigoureux que tous accoururent avec empressement et quand ils virent le trésor dans les mains du jeune garçon, devinèrent que si l'Esprit venait de distinguer un enfant, ce n'était pas pour ses talents à gouverner mais pour sa capacité à servir.
COMMENTAIRE
Ce conte a été donné à une femme remarquable qui, toute sa vie a été attirée par la civilisation amérindienne. Elle est artiste, thérapeute, fait de la céramique et de la poterie. Et elle est vraiment "au service" mais pas dans la servitude.
PISTE DE REFLEXION
De quoi le ventre est-il le siège ? Est-ce aussi parce qu'il a fait en lui l'unité "masculin, féminin" que l'enfant a trouvé le "trésor" ?
QUEBEC (photo de l'auteure)