Toute une contrée était, autrefois, terrorisée par un terrible dragon. A maintes reprises, on avait tenté de s’en débarrasser mais, pour l’heure, tout avait lamentablement échoué.
On fit donc appel à un chevalier. Le choix n’était, certes pas, des plus judicieux puisque l’élu était à peine sorti du lait de sa mère. Il était inexpérimenté, timide et manquait parfois d’audace. Mais, était suffisamment stupide pour s’engager dans une si folle aventure. Et c’est tout ce qu’on lui demandait…
Pour combattre, on lui remit une courte lame et un bouclier fait de simples feuillages. Voyant sa mine déconfite, on s’empressa de le rassurer :
« Tu apprendras… »
« La belle affaire… » Pensa notre jeune héros.
Heureusement pour lui, même s’il avait l’inexpérience de son âge, il n’était pas couard et, avec hardiesse, s’enfonça dans les bois où se terrait la bête.
Tous retinrent leur souffle et attendirent… Ils n’eurent pas longtemps à attendre car, bientôt, du plus profond de la forêt, retentirent des rires tonitruants.
On se regarda avec surprise puis avec effroi. Que pouvait-il bien se passer, là-bas, dans ces ténèbres inconnues ?
Quand le chevalier réapparut, tous se pressèrent autour de lui, si grand était leur étonnement de le voir toujours de ce monde. Puis on l’interrogea. Et, sans détour, il répondit :
« Point ne m’a été besoin de combattre : j’ai dû, pour dompter la bête, utiliser seulement mon cerveau. Jugez-en par vous même : avec la courte lame que vous m’avez donnée, j’ai coupé une feuille de mon bouclier si ridicule et, pendant que le dragon dormait, je me suis contenté de le chatouiller… Je dois ajouter qu’il est particulièrement sensible sous les aisselles et sous la plante des pieds. L’entreprise n’avait, certes, rien de redoutable pour un homme de ma trempe… »
A peine l’effronté avait-il fini son beau discours, qu’aussitôt, sortant de son antre, apparut le redoutable monstre qui, doux comme un agneau, vint lécher les doigts de son maître enfin trouvé.
COMMENTAIRE
Ce conte a été donné à un groupe de personnes qui partaient en voyage dans le pays Cathare. Chevalier, dragon, lait de la Vierge..., qu'allaient -ils donc trouver pendant leur périple ? Sans doute des secrets alchimiques...
PISTE DE REFLEXION
Le chevalier pourrait-il être aussi troubadour ? Pourquoi est-il à peine sorti du lait de sa mère ? Pourquoi l’arme employée par le jeune homme est-elle si redoutable ?
VIETNAM (photo de l'auteure)